POLITIQUE | Kabila à Goma : entre provocation politique et quête de légitimité

POLITIQUE | Kabila à Goma : entre provocation politique et quête de légitimité

Ce dimanche, la ville de Goma, théâtre de violents affrontements depuis des mois, a accueilli une visite pour le moins inattendue : celle de Joseph Kabila. L’ancien président, dont l’ombre plane toujours sur la vie politique congolaise, a fait son retour dans l’Est en grande pompe, sous la protection du M23. Une apparition calculée qui en dit long sur les fractures du pouvoir congolais.

Un retour sous haute tension

La scène aurait pu paraître surréaliste il y a encore quelques mois : Joseph Kabila, l’homme qui a dirigé la RDC pendant près de deux décennies, foulant le sol d’une ville contrôlée par des rebelles accusés d’être soutenus par Kigali. Pourtant, ce dimanche, l’ancien chef de l’État a bel et bien débarqué à Goma, accueilli comme un hôte de marque par l’AFC/M23.

Une visite qui tombe à pic. Quelques jours plus tôt, le Sénat levait son immunité parlementaire, ouvrant la voie à des poursuites judiciaires pour « collaboration avec des groupes armés ». Coïncidence ? Pas vraiment. Pour Kabila, ce déplacement est un coup politique : il montre qu’il conserve des soutiens, y compris dans les zones en rébellion ouverte contre Kinshasa.

Le M23 roule out le tapis rouge

Les rebelles n’ont pas caché leur satisfaction. « Goma est aujourd’hui le seul endroit du Congo où règne la vraie liberté », a lancé Corneille Nangaa, président de l’AFC/M23, dans une déclaration aussi provocante que symbolique. Le message est clair : Kabila est le bienvenu, contrairement au « régime tribaliste et corrompu » de Kinshasa.

Une rhétorique bien rodée. Depuis février, le M23 multiplie les opérations de séduction, invitant délégations religieuses et politiques à constater sa « bonne gouvernance ». L’arrivée de Kabila s’inscrit dans cette stratégie : elle donne une forme de légitimité à la rébellion, tout en embarrassant le pouvoir central.

Kabila contre-attaque

L’ancien président ne s’est pas contenté d’une visite protocolaire. Dans un discours enflammé, il a accusé Félix Tshisekedi d’avoir « abandonné l’Est à son sort », pointant du doigt le blocus financier et les restrictions de mouvement imposées à la région. « On asphyxie délibérément les populations », a-t-il tonné, se posant en défenseur des laissés-pour-compte.

Surtout, il a dégainé un « plan de sortie de crise » en 12 points, mélange habile de propositions techniques et de piques politiques. Entre appels à la réconciliation et condamnations des « mercenaires étrangers », le sous-texte est transparent : Kabila se présente en alternative.

Que cherche vraiment Kabila ?

Derrière les grands gestes, plusieurs scénarios sont possibles :
Une manœuvre d’intimidation : en montrant qu’il peut compter sur des appuis armés, Kabila envoie un avertissement à Kinshasa.
Une préparation à 2027 : l’ancien président teste le terrain en vue d’un éventuel retour.
Un simple baroud d’honneur : isolé politiquement, il tente de rester dans le jeu.

Une chose est sûre : cette visite relance les spéculations sur ses liens réels avec le M23. Le gouvernement, lui, garde un silence prudent. Mais à Kinshasa, les dents doivent grincer. Car en politique congolaise, quand Kabila bouge, le sol tremble.

Josué KEFEBE

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Rédaction | Excellence info |

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