TRIBUNE | Processus de paix RDC-Rwanda : Vers un nouvel échec pour la RDC ? Le Qatar derrière Kigali, et si l’Arabie Saoudite serait un Joker pour Kinshasa ?

Alors que les négociations progressent avec la médiation cette fois-ci, avec les États-Unis et le Qatar, le déséquilibre des soutiens internationaux pourrait condamner les efforts diplomatiques de Kinshasa. La RDC doit-elle chercher un allié de poids comme l’Arabie Saoudite pour contrebalancer l’influence du Qatar au Rwanda ?
Le processus de paix entre la République démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda semble une nouvelle fois voué à l’échec pour le pays qui détient des variétés de ressources. Malgré les multiples rounds de négociations et les efforts diplomatiques, les tensions persistent, alimentées par des soutiens extérieurs asymétriques et le Rwanda assiège toujours une partie du territoire congolais. Alors que le régime de Kagame bénéficie du soutien économique et politique du Qatar, un investisseur majeur sur son sol, celui de Félix TSHISEKEDI peine à trouver un appui équivalent. Dans ce contexte, une question se pose : et si Kinshasa se tournait vers l’Arabie Saoudite, acteur clé des conflits régionaux et nouvelle puissance pivot des équilibres géopolitiques ?

Un processus de paix déséquilibré
Depuis des années, les relations entre la RDC et le Rwanda sont marquées par des accusations de soutien aux groupes armés, d’ingérence et de concurrence économique. Les négociations, souvent facilitées par des médiateurs régionaux ou internationaux, n’ont abouti qu’à des trêves fragiles.
Un élément crucial explique cette dynamique : le Rwanda, bien que petit en taille, dispose d’un allié de poids, le Qatar. Doha a massivement investi dans le pays, soutenant son développement économique et renforçant son influence diplomatique. Ce partenariat offre à Kigali une marge de manœuvre importante, tandis que la RDC, malgré ses immenses ressources, ne bénéficie pas d’un soutien aussi structurant de la part d’une puissance étrangère.
Le Qatar, un atout majeur pour Kigali
Le Qatar est devenu un acteur incontournable en Afrique de l’Est, avec des investissements stratégiques dans les infrastructures, l’énergie et la sécurité. Au Rwanda, Doha a signé des accords économiques majeurs, notamment dans l’hôtellerie, l’aviation et les télécommunications. Ce soutien économique se double d’un appui diplomatique, permettant au Rwanda de peser dans les négociations régionales.
Face à cette réalité, la RDC apparaît désavantagée. Bien qu’elle dispose de partenaires traditionnels (la Chine, la France, les États-Unis), aucun ne joue un rôle aussi direct et engagé que le Qatar avec le Rwanda. Pour inverser la tendance, Kinshasa doit peut-être chercher un allié capable de contrebalancer cette influence.
L’Arabie Saoudite, un partenaire potentiel pour la RDC ?
Dans le paysage géopolitique actuel, l’Arabie Saoudite émerge comme un centre de gravité des conflits et des alliances. Ryad, engagé dans plusieurs guerres par procuration (Yémen, Syrie) et en rivalité avec le Qatar, cherche à étendre son influence en Afrique.
Pour la RDC, un rapprochement avec l’Arabie Saoudite pourrait présenter plusieurs avantages :
Contrepoids au Qatar : En s’alliant avec Ryad, Kinshasa pourrait bénéficier d’un soutien diplomatique et économique face à l’axe Doha-Kigali.
Investissements dans les secteurs clés : L’Arabie Saoudite, à travers son fonds souverain (PIF), investit massivement dans les mines, les infrastructures et l’énergie – des domaines où la RDC a besoin de partenaires.
Lobbying international : Ryad a une forte capacité d’influence dans les instances comme l’ONU ou l’Union africaine, ce qui pourrait aider la RDC à faire entendre sa voix.
Cependant, ce choix ne serait pas sans risques. L’Arabie Saoudite est elle-même impliquée dans des conflits complexes, et un alignement trop marqué pourrait exposer la RDC à de nouvelles tensions géopolitiques.
Une nouvelle stratégie s’impose
Le processus de paix entre la RDC et le Rwanda ne peut aboutir sans un rééquilibrage des forces en présence. Si le Qatar soutient Kigali, Kinshasa doit trouver un partenaire capable de lui offrir un levier équivalent. L’Arabie Saoudite, avec ses ressources et son influence, pourrait être cette pièce manquante.
Mais au-delà des alliances, la RDC doit aussi renforcer sa gouvernance et sa stabilité interne pour éviter que les soutiens extérieurs ne deviennent un facteur de dépendance. La paix dans la région des Grands Lacs ne se construira pas uniquement par des appuis étrangers, mais par une volonté politique forte et une coopération régionale sincère.
La RDC doit-elle jouer la carte saoudienne pour sortir de l’isolement diplomatique, ou cette stratégie risquerait-elle de l’enfermer dans de nouveaux jeux d’influence ?
Par Josue Kefebe